Nouveautés concernant la limitation de la déduction des intérêts pour les sociétés d'un groupe

Nouveautés concernant la limitation de la déduction des intérêts pour les sociétés d'un groupe

La directive anti-évasion fiscale ou directive ATAD (Anti-Tax Avoidance Directive) oblige notamment les États membres à limiter la déduction des intérêts intra-groupe à certains plafonds.
La Belgique a transposé cette directive en droit belge dans le cadre de la réforme de l'impôt des sociétés de 2017. La limitation entre en vigueur à compter de l'exercice d'imposition 2020, mais des corrections ont d'ores et déjà dû y être apportées.

La règle thin cap

La réforme de l'impôt des sociétés prévoit, pour les sociétés faisant partie d'un groupe, une limitation de la déduction des charges d'intérêts nettes en cas de dépassement de certains plafonds. Deux plafonds ont en réalité été fixés et lorsque le plus élevé des deux est dépassé, la partie des intérêts qui dépasse ce plafond n'est pas déductible. Ces deux plafonds sont les suivants :

3.000.000 euros ; et

30 % de l'EBITDA fiscal.

La partie des intérêts que vous ne pouvez déduire en raison de cette règle est reportée aux années suivantes.

Notions

Expliquons tout d'abord quelques notions :

Les charges d'intérêts nettes (ou le surcoût d'emprunt) : il s'agit de la différence entre les intérêts (déductibles) payés et les intérêts (imposables) perçus. Attention : cette définition est très large. Elle ne vise pas seulement les intérêts intra-groupe mais aussi les intérêts que vous avez payés à des institutions financières ou reçus de leur part.

L'EBITDA fiscal : l'EBITDA est un terme du monde financier qui vous donne une idée du bénéfice opérationnel de l'entreprise. Il s'agit de l'abréviation pour “Earnings Before Interest, Taxes, Depreciation and Amortization” (bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciations et amortissements). Cette notion a encore été quelque peu affinée dans le cadre de cette limitation de la déduction : l'EBITDA fiscal est le résultat imposable

augmenté des amortissements, des réductions de valeur et du surcoût d'emprunt susvisé de l'année même ;

diminué de la déduction RDT (de l'année en cours mais aussi des déductions reportées), des revenus de brevets ou des revenus d'innovation déductibles, du montant déductible du transfert intra-groupe et des bénéfices exonérés en vertu d'une convention.

Qui n'est pas concerné ?

Toute une série de contribuables ne sont pas soumis à cette mesure, notamment les entreprises du secteur financier (établissements de crédit, entreprises d'assurance et entreprises d'investissement). Si votre société ne fait pas partie d'un groupe de sociétés, vous ne serez pas non plus soumis à la limitation de la déduction, pour autant que votre société n'ait pas une participation dans une autre société à hauteur de 25 %. Votre société ne peut pas non plus avoir d'actionnaire détenant dans votre société et dans une autre société une participation de chaque fois plus de 25 %.

Autrement dit : si vous disposez de (plus de 25 % de) deux sociétés, ces deux sociétés font partie d'un groupe et la limitation de la déduction est d'application.

Corrections

Une première petite correction apportée récemment concerne le calcul de l'EBITDA. Vous devez augmenter la base imposable des amortissements, des réductions de valeur et du surcoût d'emprunt de l'année même. Si votre surcoût d'emprunt est trop élevé, il est reporté à l'année suivante mais en exonération d'impôt. Et bien... ce surcoût d'emprunt reporté et exonéré doit lui aussi être ajouté pour calculer l'EBITDA fiscal.

La deuxième modification concerne les sociétés qui font partie d'un groupe de sociétés (généralement international) d'une certaine importance. Pour calculer l'EBITDA d'une telle société, il est fait abstraction des transactions intra-groupe. Dans l'ancienne version de la loi, seules les transactions entre les sociétés du groupe étaient contre-passées. Mais un transfert de dividende d'une société à l'autre était bien pris en compte (alors qu'au sein du groupe, il s'agit d'une opération neutre). Cette disposition est donc désormais adaptée de manière à ce que les coûts qui sont dus à ou les revenus qui sont dus par une société résidente ou un établissement belge ne soient pas pris en compte.

Enfin, un ajustement était encore nécessaire afin d'éviter qu'en cas de fusion ou de scission, le surcoût d'emprunt reporté ne soit perdu.

Anciens emprunts

Les emprunts conclus avant le 17 juin 2016 ne sont pas non plus visés, pour autant qu'aucune modification fondamentale n'y ait été apportée depuis cette date. On entend par modification fondamentale une modification concernant les parties, le taux d'intérêt, la durée ou le montant prêté. En cas de refinancement d'un ancien emprunt, il est également question de nouvel emprunt.
La limitation de la déduction pour les intérêts intra-groupe constitue une matière très complexe.
Si les intérêts que vous avez payés n'excèdent pas 3 000 000 euros, pas de problème. Si vous approchez de ce montant, mieux vaut prendre votre machine à calculer et faire appel à un expert-comptable.